Comment les traiteurs prennent le pas sur les cuisiniers ?

Les traiteurs ont d’abord eu de simples boutiques, puis ils ont investi le marché des manifestations privées ou professionnelles en créant des événements de plus en plus exceptionnels, ils se placent aussi sur le secteur des plateaux repas aux entreprises. Ils ont placé leur création sur la « gastronomie de partage » ancrée dans les recettes françaises : à ce rythme ils auront plus d’influence dans les années à venir que les cuisiniers : explication d’un phénomène en marche.

Touchés par la désertification des centres-villes, leurs boutiques ont été repensées et connaissent des nouveaux relais de croissance : restauration de place assises, vente à emporter, livraison à domicile, le moindre montage de pâté en croûte devient même un événement pour journalistes et bloggeurs.

De leur côté, les chefs « étoilés » ont compris que les guides les avaient maintenant installés au pied d’un volcan et plus comme avant, en haut de la montagne. Depuis la stratégie de la terre brulée des guides pour tenter de sauver leur place de leader auprès du grand public, chaque chef de cuisine, avant tout chef d’entreprise, a compris qu’il est voué à subir la lave enflammée du déclassement qui pourrait ensevelir sa réputation, créer un questionnement perpétuel sur ses propres capacités professionnelles, voire même à enterrer son entreprise qui le conduirait à vendre ou à fermer.

Au niveau de la communication, nous sommes passés sur ces 10 dernières années de la valorisation chefs de cuisine à celle des chefs pâtissiers, et dans les 10 prochaines, ce sera certainement au tour des traiteurs.

D’abord car le niveau des traiteurs n’a jamais été aussi haut, ils puisent leur création dans les recettes historiques de la gastronomie française et conçoivent maintenant leurs bouchées comme des bijoutiers, design, goût, pièces exceptionnelles, leurs créations sont instagrammables et leur niveau d’excellence et le même que les plus grands restaurants distingués. Ainsi la recherche du dépassement de soi est aussi présente, et les concours tel que le MOF, le MAF ou encore les jeunes espoirs internationaux catering, sont de très haut niveau.

Ensuite, grâce à leur organisation des ressources humaines, les cuisiniers des traiteurs travaillent en journée continue, fixe et pas le soir, certes il y a le coup de bourre pendant les fêtes, mais les cuisiniers des restaurants s’intéressent de plus en plus à ce secteur pour changer de vie tout en gardant leur métier. Pourquoi des horaires de vie différents ? C’est simple il y a 15 ans 90 % des couples étaient dans le même secteur d’activité, nous rencontrions l’amour sur notre lieu de travail. A ce jour avec les applications de rencontre sur internet, vous êtes cuisiniers ou cuisinières et les profils que vous rencontrez sont dans d’autres secteurs avec des horaires différents. Alors, certains font la concession de quitter le dressage à l’assiette pour les dressages au plateau pour simplement s’adapter à leur compagne ou compagnon.

Sans le poids du classement, les traiteurs innovent, ne s’interdisent rien, et travaillent souvent en famille. Leur économie est meilleure que celle d’un restaurant car les marges sont supérieures grâce aux menus commandés : moins de pertes et des recettes où vous pouvez facilement repasser les parures ou chutes. Au niveau de la dynamique, un boulevard s’offre à eux pour la restauration consommée à domicile : ils ont l’outil de production et les recettes pour capter ce marché.

Les traiteurs ont aussi gardé un statut : artisan : ballotine, galantine, saucisson, jambon, boudin, pâté en croute, pâté de tête, pâté de campagne, foie gras… une structure qui donne du corps au métier, chaque représentant dans sa propre région fait vivre et battre le cœur de la France à travers sa culture culinaire. Les plus audacieux ont même mélangé certaines de leurs recettes pour faire vivre le métissage.

Le traiteur devient de plus en plus restaurateur, est ce que le restaurateur dans les années à venir ne va-t-il pas aussi devenir traiteur et repenser son lieu de production, l’aménagement des horaires, son offre sous forme de banquets ou encore la vente à domicile ?

 

 

 

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