J’ai toujours été surpris que les restaurateurs organisent leur ouverture en septembre, plus particulièrement sur Paris, la profession calque sa nouvelle offre sur le rythme des médias et de l’économie, mais rarement en fonction de la nature.
Lancer une adresse et une carte en septembre ou octobre, c’est créer des plats sur une fin de saison d’été qui auront une courte durée de vie pour faire rapidement place à l’automne. Et comme les blogueurs et les journalistes veulent être parmi les premiers à juger une table, de mon point de vue, cette analyse est toujours biaisée car nous sommes sur la fin et le début du meilleur.
Mais cette année les sachants ont encore fait plus fort : flinguer en juin des restaurants qui n’étaient pas encore ouverts comme le Plaza repris par Jean Imbert et ses équipes, et lorsque les nouveaux restaurants viennent d’ouvrir, pour certains l’assiette n’est pas adaptée au cadre ou le cadre n’est pas adapté à l’assiette.
D’un autre côté des chefs comme Yves Camdeborde expliquent que les critiques gastronomiques n’ont plus le niveau ou d’autres comme Guillaume Sanchez indiquent que les critiques ne payent pas leur addition et jouent double jeu avec des agences de presse pour créer des contenus.
Finalement, les uns n’ont plus conscience des blessures psychologiques qu’ils provoquent sur les autres alors que nous évoquons l’un des plus beaux métiers du monde qui d’autant plus quand il est sous le signe de la gastronomie s’apparente aux codes de la haute couture.
Pourquoi, c’est le plus beau métier du monde ?
- D’abord, car la nourriture agit sur le cerveau comme le désir sexuel, la simple vue d’une photo de plat appétissant met le cerveau en émoi. Son activité augmente de 24 % dans les zones liées à la perception et au contrôle des émotions ainsi qu’à la prise de décision (NeuroImage, 2004). Vous avez beau être dans d’autres métiers où la main est intelligente, savoir créer le désir est lié à peu de profession.
- Ensuite, c’est un métier qui change la destinée du monde, bousculé par la génération Y, celle qui est née dans entre 1980 et 2000, qui pourrait être appelée la génération Yum (miam). Cette génération est plus attentive à son alimentation que celle de ses parents, où ils souhaitent reprendre le contrôle du contenu de leur assiette, l’abondance n’a plus de sens et la sélection du bon produit au bon moment a un impact bénéfique pour réduire le réchauffement climatique. Vous avez beau évoluer dans d’autres métiers, ici, vous savez que si vous êtes engagés et quelque soit la cause, vous pouvez avec un mouvement d’ailes de papillon contribuer à des vents nouveaux.
- Enfin, l’introspection des chefs qui s’est accélérée avec la crise de la Covid-19 démontre que les conditions de travail, les rémunérations, les horaires de fermeture, etc., contribuent à faire que ce métier soit 50 % moins dur qu’il y a 20 ans. Alors la passion et la transmission renaissent, cependant je suis encore conscient que des managements autocrates sont encore en place où leur dynamique sera cassée par un accompagnement en coaching et formation.
Alors je pense qu’il est temps de laisser les égos de côté pour comprendre que nous devons souhaiter la meilleure des réussites à chaque entreprise qui ouvre, les meilleures joies pour chaque collaborateur et collaboratrice qui arrive dans une nouvelle aventure, les meilleures chances pour chaque carte qui se lance car elle met en avant un producteur de France.
Avec grande confiance, et sans avoir mis un pied au Plaza, je vous prédis que Jean Imbert réussira dans les deux restaurants pour des raisons psychologiques simples :
- L’attitude et le professionnalisme de ses collaborateurs
- La prise de conscience qu’il a du terrain de jeu, car jouer en ligue des champions vous fait toujours devenir meilleur, c’est ce que l’on appelle l’autodépassement surtout quand vous en rêviez enfant.
- La niaque qui l’anime, conditionnée par cette volonté de faire plaisir.
« En général, tout mal auquel nous ne succombons pas est un bienfaiteur pour nous. » Emerson