Libéré, mais pas délivré

Vraisemblablement les restaurants et cafés pourront rouvrir le 2 juin pour les zones vertes, le 21 juin pour les zones rouges, la date de la libération est proche, cependant la délivrance ne sera pas tout de suite au rendez-vous. Pourquoi ?

La délivrance par les assureurs ? : c’est incontestable, la pugnacité de Stéphane Manigold est remarquable, il a attaqué très tôt en justice l’assureur Axa, une sorte d’affiche de David contre Goliath. Cependant, c’est une brèche qui a été ouverte par ce premier jugement en sa faveur, le second round sera plus dur pour arriver à obtenir définitivement gain de cause, je lui souhaite bien entendu, car la spécificité de la relation contractuelle qu’il a établi avec son assureur lui permet peut être de faire valoir ses droits d’indemnisation. Mais nous sommes loin d’un cas qui pourrait faire jurisprudence sur l’ensemble des cabinets d’assurances. Il gagne ? Je propose que la poignée de restaurateurs équipés du même contrat, lui dise : « Stéphane, tu as table ouverte à vie chez nous ! ».

La délivrance par le management : Les Français, comme vous et nos collaborateurs sortons doucement d’une période d’isolement de presque 3 mois où des solitudes se sont installées. Vous ne pourrez pas rouvrir comme vous avez fermé. Le management par la considération sera essentiel pour regagner la fidélité des équipes. Pensez que leur reprise d’activité doit se faire comme un parcours d’intégration complète, les prises de parole des équipes d’encadrement en collectif ou en individuel devront être régulières pour offrir la meilleure offre et créer de l’enthousiasme au travail.

La délivrance par la considération de tous : J’aimerai attirer votre attention sur une catégorie de collaborateurs et collaboratrices ô combien essentielle aux métiers de la restauration : les extras. Ils ont la capacité d’incarner plusieurs marques d’établissement dans la même semaine sans pour autant que les clients s’en rendent compte et ainsi ces derniers passent des moments merveilleux. Pour certains c’est un mode de vie, pour d’autres c’est une nécessité. En sachant que les réceptions en grand nombre ne vont pas repartir tout de suite et que les restaurants ayant moins de capacité en place assisse ne vont pas faire appel à du personnel extérieur, ils risquent d’être les plus fragilisés alors qu’ils étaient avant la brigade de France la plus essentielle. Nous devons ensemble leur trouver des solutions.

La délivrance par la flexibilité : Les consommateurs auront des difficultés à accepter les accords du passé ; paiement à la réservation, arrhes contraignantes en hôtellerie, carte bancaire pour confirmer une table de restaurant… Pour offrir de la sécurité à votre chiffre d’affaires, il faudra proposer de nouveaux services, comme l’assurance annulation, développer les packages dynamiques, accepter les réservations de dernière minute et donc avoir aussi des équipes flexibles, dernier point,  allonger les dates de validité sur les coffrets cadeaux !

La délivrance par les gestes barrières : J’aimerais que l’on arrête de parler de distanciation sociale, mais plutôt de distanciation physique. Il est normal que nous nous posions la question des personnels en salle pour leur assurer le maximum de protection car eux seront exposés à des clients sans masques. Il y a une surenchère des gestes barrières avec des modèles que je trouve même un peu effrayants. J’estime que le consommateur n’attend pas du visuel uniquement en salle, mais des informations concrètes sur comment son repas est préparé ? Il sera plus demandeur sur les normes sanitaires en cuisine pour que son assiette ne soit pas contaminée car comme c’est à l’arrière, il ne voit rien, que l’atmosphère de plexi et masques en salle : ne vous trompez pas de combat dans votre communication et votre site internet officiel pour informer est le meilleur outil.

La délivrance en se réinventant : Une nouvelle phase « inconnue » se profile, le présent est chaotique et l’avenir plus qu’incertain, : une contagion économique peut amener certains à baisser le rideau mais là définitivement. Cependant je n’ai jamais senti autant de résilience chez certains, une prise de conscience sur la nécessité d’agir maintenant avec agilité et je trouve remarquable qu’une solidarité se crée entre les acteurs, une proximité entre tous pour défendre la vie des territoires et avec la volonté d’agir durablement sur l’environnement. Pour mener cette offensive, je suis de ceux qui pensent que nous pouvons adapter l’ensemble de la gastronomie à travers une économie vertueuse.

L’ensemble des métiers de bouche et la restauration sont un pan de notre patrimoine. Nous avons déjà par le passé libéré Paris et libéré la France, nous saurons ensemble relever le défi de libérer l’ensemble de la gastronomie.

 

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