Plaidoyer pour un pourboire pour tous

Le pourboire au restaurant est-il un effet de levier pour le pouvoir d’achat ? Incontestablement oui.

Il n’est pas assujetti à l’impôt, il représente même jusqu’à 25 % de plus de salaire net dans certains établissements, cependant il s’amoindrit aussi car cela une étude du CSA démontre que 35 % des Français ne laissent pas de pourboire par manque de monnaie, n’oublions pas aussi que nous sommes le peuple le plus pingre, il reste cependant élevé sur les clientèles étrangères.

Le pourboire reste pourtant un sujet polémique entre la cuisine et la salle car les pourboires peuvent être définis comme toutes les perceptions faites « pour le service ». Certaines maisons corrigent le tir, souhaitent une meilleure répartition entre la salle et la cuisine alors le pourboire comment cela marche ?

Le saviez-vous ? le pourboire en France peut être obligatoire ou volontaire. Dans le premier cas, l’entreprise est collectrice, dans le second, c’est le salarié.

Obligatoire, cela veut dire que vous pouvez sur l’ensemble de vos factures par exemple ajouter un montant de 5 % qui fait que le client paye sa note plus ce montant de 5 % sur l’ensemble de sa prestation. Pour bien comprendre, un restaurant qui ferait 1 million d’euros percevra 50 000 euros par an pour ses salariés, compte tenu qu’il est obligatoire, vous devrez déclarer une TVA de 10 %, il restera donc 45 000 euros. Pour une entreprise de 10 personnes, c’est donc une moyenne de 375 euros par mois et par salarié de versé. Peu de restaurants utilisent cet outil, car la majorité préfère ce que l’on appelle pourboire volontaire, comme il est versé spontanément par le client, celui-ci n’est pas imposable.

Ce que l’on sait moins aussi, c’est que le personnel n’est pas habilité à gérer les pourboires, mais c’est le chef d’entreprise qui doit évaluer le montant des pourboires perçus par le personnel et les faire figurer dans ses écritures comptables. (D. adm. 4 C-122 n° 10, 30-10-1997 ; BOI-BIC-CHG-10-20-20 n° 90, 19-5-2014 ). Mais dans la pratique comme il échappe au suivi et contrôle du restaurateur, des abus de répartition existent et l’ensemble des salariés ne sont pas récompensés alors que l’expérience client, elle, est bien globale.

Enfin, la loi de finance du 1 janvier 2022, vise clairement à inciter les consommateurs à verser des pourboires par CB et s’inscrit dans la philosophie de rendre de l’attractivité au métier. Concrètement l’article 5 de cette loi de finance indique que toute somme versée par CB n’est pas assujettie à l’impôt sur le revenu et exclut aussi les contributions sociales. Cependant, le salarié est tenu de déclarer sur sa feuille d’impôt la somme perçue, ce que personne ne fait.

Dans ce contexte de plus en plus de restaurateurs s’équipent de solutions digitales qui permettent aux consommateurs d’ajouter spontanément depuis l’appareil à carte bancaire un pourcentage à la note par exemple de 3, 6, ou 10 % et de saisir ensuite leur code secret de CB pour payer, ce surplus d’argent transite ensuite directement sur les comptes des salariés qui ont été préalablement saisis. Des solutions techniques de qualité mais au prix indécent, car une commission en moyenne de 8 % est prise pour ce service sur les pourboires CB des salariés, dans mon cas cité plus haut : 4 000 euros pour 50 000 euros de pourboires pas an !

Cependant, cette digitalisation donc traçabilité, jumelée à une période d’exonération prévue uniquement pour deux ans, n’engagent pas la profession vers la création d’un impôt pris sur la spontanéité du consommateur au détriment d’un outil qui est véritablement au bénéfice du pouvoir d’achat ? (Je glisse cela ici au cas où parmi mes lecteurs un représentant des syndicats se pose la question s’il ne faut pas se saisir du dossier dès maintenant.)

Pour bien comprendre, les pourboires volontaires payés en espèce aux salariés, les pourboires volontaires centralisés par l’employeur et/ou versés par CB ne sont pas tous les deux imposables, les pourboires obligatoires sont eux imposables de 10 % mais un vrai calcul est à faire dans l’entreprise.

Combien de pourboires sont en réalité versés spontanément par le client ? Certes, les montants sont assez opaques car souvent kidnappés par le service en salle, mais même si 10 % sont retenus sur les pourboires obligatoires, n’est-ce pas une solution pour les répartir équitablement une bonne fois pour toutes sur l’ensemble des salariés et de lever les doutes sur les rémunérations obscures car tout le monde a besoin de pouvoir d’achat, du plongeur au directeur, et sur l’ensemble des services.

 

 

 

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