Je ne sais pas si vous avez remarqué, mais depuis un bon trimestre maintenant, la presse nous pilonne d’articles anxiogènes pour nous expliquer que cette période de morosité, de volatilité, d’incertitudes nous condamne tous au « pire est devant nous ».
Par exemple, Food and Sens a dernièrement partagé un article des Echos dans son fil des réseaux sociaux expliquant que « l’activité économique multiplie les signes de ralentissement en France » et si en voiture vous écoutez BFM business, « ben » votre seul ami à la rentrée de septembre, c’est le barman de votre quartier qui a eu la bonne idée de créer le cocktail « j’mepends » dosé à un tiers de Prozac, d’un tiers d’alcool fort et un doigt de ghb.
Alors je me suis demandé si dans ce contexte où l’inflation est devenu le fléau de notre société, l’avenir économique de la restauration sera également en berne.
Je me suis alors souvenu d’une expérience menée par les professeurs Netchaeva et Rees qui ont démontré que lorsque les femmes étaient soucieuses par rapport à leurs finances, que ce soit à cause de la crise ou pour d’autres circonstances, elles utilisaient le maquillage pour atténuer leurs inquiétudes. Par exemple, après le 11 septembre, il y a eu une explosion des ventes de rouges à lèvres.
Concrètement ce phénomène démontre que quand on vous explique que vous allez être ruinés et bien les consommateurs préfèrent attendre pour acheter de plus grosses choses au profit des petits plaisirs.
Cet effet sociologique observé historiquement par les marketers américains travaillant dans le secteur du luxe a été baptisé le lipstick effect. L’effet rouge à lèvre est utilisé comme un indicateur de la pression économique exercée sur la consommation de produits premium et luxe. Lorsque les ventes de rouges à lèvre augmentent « anormalement », les secteurs ayant de gros investissements doivent s’attendre à un ralentissement, voire à une récession. On a en effet observé qu’en période de récession, les consommatrices qui n’avaient pas/plus les moyens de s’offrir de coûteux produits de luxe percevaient le rouge à lèvre comme un signe de luxe qui restait abordable, compte tenu du prix relativement accessible d’un tube de rouge à lèvre. Ce qui occasionne une augmentation des ventes.
La restauration : c’est un luxe abordable.
Il suffit d’observer les résultats du premier semestre de grande qualité dans un grand nombre de restaurants, la SNCF annonce déjà 8 millions de billets vendus pour cet été, c’est-à-dire à + 10 % d’avant 2019, les compagnies aériennes sont prises d’assaut et n’ont pas assez de mains d’œuvre pour assurer tous les vols, la saison estivale sera l’un des plus prometteuses de ces 5 dernières années.
Alors ce ralentissement où certains pensent que nous pouvons aller jusqu’en récession pour 1 ou 2 trimestres va très peu toucher le secteur de la restauration, hormis celui de la restauration d’entreprise qui cherche déjà des solutions pour se réinventer à la suite du télétravail dans les entreprises qui ont fortement réduit les effectifs en présentiel.
En réalité, ce qui va être plus compliqué sur les 2 années à venir, c’est la création et transmission d’entreprises, depuis maintenant 6 mois, une grande majorité de banques ont pour consigne de ne plus financer les investissements dans la restauration et les apports exigés frôlent maintenant les 30 à 40 % pour boucler une opération. En conséquence, les projets seront demain seront portés par des entrepreneurs mais aussi des fonds d’investissement plaçant leur argent entre 4 et 6 % pour faire cet apport initial pour que les banques s’inscrivent timidement dans ces projets.
Sur l’opérationnel, la meilleure stratégie est d’augmenter ses tarifs avant l’été, pas pour gagner plus, mais pour atténuer l’inflation de l’énergie, la matière première et la hausse de salaire. Elle se fait facilement sur le liquide, elle est plus compliquée sur les menus. Cependant, travailler en ce moment l’ouverture de sa gamme de prix, retirer des menus les plus attractifs à la vente en forte période d’affluence comme le soir ou du week-end, s’engager dans des menus qui seront peut-être vendus au cours du marché des produits achetés (une sorte de menu déjeuner de X€ à Y € et le jour venu le client paye le prix lié au produit) pour proposer le prix le plus juste est la décision de cet été pour être prêt pour la rentrée.
Votre secteur est un pilier de notre économie, il reste prometteur et sera en croissance, et cette croissance va pouvoir être investie pour positionner votre établissement au meilleur endroit et elle va contribuer à venir inventer un nouveau modèle social favorisant la fidélisation des équipes. #positivepower # lipstickeffect