A condition… de changer les conditions !

« Pour crier sur quelqu’un d’autre, il faut devenir chef !».

 

A 2 Minutes 50 dans cette vidéo publiée sur la page facebook de Eating.be media belge suivi par 46 358 personnes, un chef prend la parole sous l’intitulé  racoleur : « Le cri du cœur d’un chef étoilé ».

L’opération menée par le média a pour but d’alerter sur la crise des ressources humaines que traverse la profession. Après un premier constat, le journaliste lance le deuxième sujet : « Les pistes pour avancer »…

Elles se résument  « dixit le chef » en 3 séquences :

  • « C’est la faute des parents qui ne préviennent pas assez leurs enfants que c’est un métier où il faut faire beaucoup d’heures et que oui les chef crient et ce n’est pas pour cela qu’il faut claquer la porte…. pour crier sur quelqu’un d’autre il faut devenir chef »
  • « Les écoles doivent revoir leur système de formation car les stagiaires en juillet et août, là ou il a le moins de travail et les périodes ne sont pas assez longues, donc ce n’est pas intéressant…»
  • « et qu’au final, c’est la faute de l’Etat car on paye trop de charges et nous n’avons pas d’aides de l’état..»

A la lecture des arguments développés dans cette vidéo, je suis presque mal à l’aise…

Et si le manque d’entrants dans la profession et le manque de fidélisation des collaborateurs n’étaient plus la faute des autres mais tout simplement la faute de l’entreprise ?

Vous pensez sérieusement qu’un parent à l’aube du choix de la carrière de la voie professionnelle de son enfant, va lui expliquer qu’il faut qu’il se taise face à un management autocrate, d’une organisation en silo où salle et cuisine ne se parlent pas et qu’on ne lui dira jamais « tu es un champion, tu vas pouvoir gravir les échelons » mais au contraire le jour où tu seras Chef, tu pourras crier sur quelqu’un d’autre à ton tour ?

Vous pensez sérieusement qu’à une période où vous avez le moins de travail donc le plus de temps pour l’apprenant que ce n’est pas justement le meilleur moment pour apporter une formation à un gosse et compléter le travail des enseignants ? Les enseignants dans le secteur de l’hôtellerie et la restauration n’ont jamais étés aussi proches de la réalité, ils souffrent déjà d’un écart de moyens entre le privé et le public et pourtant, les élèves qui sortent du public ont des carrières aussi brillantes que ceux du privé. Et personne ne se pose la question pourquoi sur 100 élèves sortant seulement 30 restent dans la profession ! Est-ce la responsabilité de l’école, ou des méthodes de management au cœur des entreprises dans lesquelles la considération, la motivation, la communication interne, la valorisation individuelle des talents de demain, sont aux abonnés absents  ?

Enfin, vous pensez sérieusement que c’est un problème de charges, le manque de personnel ? Toute les maisons que j’ai la chance de côtoyer me disent toutes « Rémi on n’arrive pas à recruter », aucune ne m’a dit « Rémi, on n’arrive pas à payer » !!! Accessoirement, payer des charges c’est financer les retraites, les accidents de travail, la formation des jeunes justement, et c’est accepter de contribuer à toutes ces couvertures sociales pour nos salariés.

Nous n’arriverons pas à créer un cercle vertueux pour enrayer le phénomène de la désaffection des nouveaux entrants dans ce métier avec une telle pensée.  Ne pas considérer les aspirations des jeunes attentifs au sens, voulant équilibrer une vie entre activité privée et professionnelle, et ayant autant une fibre de quête d’excellence que celle que nous avons eue par le passé, c’est passer à côté de toute la richesse d’un management intergénérationnel.

Ce n’était pas mieux avant et ce n’est pas en posant ce type de pistes pour avancer qu’en termes de communication externe, la profession va relever ce défi.

Ce n’est pas eux qui ont changé… c’est nous qui à la lecture de cette vidéo, n’avons toujours pas évolué.

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