C’est l’histoire d’un chef, qui après 5 ans de labeur avait mis le sou de côté pour s’offrir la voiture de ses rêves.
En poussant la porte du marchand à la marque d’automobiles féériques, une certaine émotion l’habita.
« Que puis-je faire pour vous aider ? » s’exclama le vendeur à l’allure élégante et au ton courtois.
« Voilà, j’aimerais faire l’acquisition d’une auto chez vous, j’en rêve depuis que je suis gosse »
« Vous êtes à la bonne adresse cher Monsieur, je vous invite à prendre « la signature », bonne routière vous en serez ravi d’autant plus que successivement, pendant 15 années, nous avons eu un crash-test à 2 étoiles, nous sommes à 3 étoiles depuis 2 ans, voyez la confiance des autres à notre égard ! Ce sera 50 000 euros Monsieur. »
« Ah très bien, directement le prix, mais elle sera comment ma voiture, rouge, bleue ? électrique, essence ? »
« Comme je viens de vous le dire, elle sera « signature » donc ayez confiance, j’ai juste besoin de savoir si vous allez parfois conduire en short ? »
« En short ? ! mais pourquoi ?!?!»
« Mais pour les allergènes sur la peau, si vous êtes en short, je dois m’adapter pour ne pas vous mettre du cuir ou simili cuir. C’est la seule chose que nous voulons savoir dans notre marque qui vous fait « tant rêver », le reste est imposé»
C’est ainsi que le chef, alors dérouté, se leva et s’en alla, pensant même que sans pouvoir choisir sa voiture, elle aurait tout de même été chaussée de 4 pneus Pirelli…
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Finalement, nous pouvons aussi nous interroger sur l’expérience vécue par un client qui s’assoit dans un restaurant où le menu est en carte blanche. Ce fameux menu « à l’aveugle », c’est un menu imposé, est-ce qu’il ne provoque pas la même déstabilisation chez le client ?
C’est en tous cas, l’un des faits que dénonce Marc Esquerré, le Rédacteur en Chef du Guide Gault & Millau, qui de maisons en maisons et lors d’évènements rappelle que le consommateur n’est plus d’accord avec les menus à l’aveugle.
Il faudrait même être borgne pour ne pas comprendre que les clients d’aujourd’hui souhaitent de la transparence.
Mieux comprendre le prix, l’origine réel des produits, simplement se laisser tenter par une lecture qui donnerait encore plus envie. Même si le menu est imposé, déjà savoir ce qu’il y a dans l’assiette, change tout. Cela permet même à la table, d’avoir un premier sujet de discussion sur l’envie du moment.
Et plus le restaurant monte en gamme, plus le consommateur va consulter le site internet pour connaître le menu en amont, même s’il sait que les plats peuvent changer lors de sa venue.
Je ne sais pas s’il faut se battre pour remettre une carte en plus des menus. Cela c’est une affaire d’offres, d’habitudes de travail, de manières d’établir des relations avec ses fournisseurs pour avoir le meilleur produit au meilleur moment, et je ne suis pas choqué par les menus uniques.
Cependant, il est temps de se poser la question de la pérennité d’une entreprise qui aurait trop confiance en elle, et qui en arriverait à ne plus prendre le soin de décrire son offre dans un marché où les attentes sont en évolution.
Renseigner, donner envie, jouer la transparence, s’attacher même à la qualité du support remis au client fait partie de l’attention à donner au client
Et il n’y a pas à juger les tables qui ont pratiqué le menu à l’aveugle ou qui le pratiquent encore, il faut juste voir ce billet : comme une ordonnance d’ophtalmologiste.