C’est incontestable, elle a le vent en poupe, fédératrice, défenseuse d’une cuisine santé, du savoir-faire artisanal, du luxe à la française, ambassadrice de producteur, d’éleveur, marque caution pour de nombreuses filières ou acteurs de l’industrie, allant jusqu’à un outil de séduction politique : la communication « gastronomie » décroche même le statut de bankable pour les acteurs économiques.
Mais à force d’être mal et surutilisée, la gastronomie est en passe de devenir un outil de propagande.
Dans le bon vieux Larousse, communiquer c’est établir un lien entre deux personnes, et la gastronomie est devenue un thème de prédilection pour que ce lien se crée et se réalise.
En 1954, c’est Raymond Oliver qui séduit par ses premières émissions de télévision. Il transforme l’image d’une tâche ménagère en savoir-faire.
Sur cette impulsion, c’est Paul Bocuse qui invente la communication dîtes : gastronomique. Visionnaire, il anticipe qu’il faut d’abord la médiatiser au national où il sait répondre au journaliste avec humour et en racontant des histoires, ensuite, il exporte la haute gastronomie française avant même sa propre image, étendard, il fait prendre conscience à des anonymes, aujourd’hui des chefs propriétaires de restaurants, qu’ils peuvent utiliser leur nom comme enseigne pour la propulser en statut de marque. En parallèle, il défend des filières de producteurs qu’il amène dans ses valises partout dans le monde, missionnaire, il incarne avec brio l’ensemble des acteurs d’un secteur : il devient le pape de la gastronomie.
Aujourd’hui la communication, ce n’est plus établir un lien entre l’un l’autre comme le faisait Monsieur Paul, car une majorité de personne, peut-être parce que notre monde nous demande l’aller plus vite, font de la « com », c’est-à-dire qu’il émette un message qui mal fait devient une information à sens unique devenant un simple acte publicitaire.
Alors pour ceux qui connaissent mes activités professionnelles, ils doivent se dire mais c’est bien dans une agence de communication qu’il travaille le galoupiot ! et bien oui ! et c’est justement pour cela que je souhaite sensibiliser les chefs et acteurs de la gastronomie.
Il y a une confusion de tout dans la définition du terme communication.
Pour communiquer, il est recommandé de commencer par déterminer une stratégie de marque, un territoire d’expression, de comprendre les valeurs profondes qui animent l’entrepreneur et ses équipes avant d’émettre le moindre message car sinon vous réalisez une campagne marketing qui vise à promouvoir un produit ou service : votre communication se transforme ainsi en un objet promotionnel. Je ne tente pas de dire que les campagnes de marketing ne sont pas nécessaires, leurs rôles c’est de défendre un produit pas une marque.
Et c’est pour cela que mal utilisée la gastronomie pourrait perdre de sa superbe, car il n’existe plus de frontières entre le marketing, la communication, le plan média ou l’anarchie de l’image et la précipitation de diffusion des contenus dans les réseaux sociaux amoindrit l’engagement profond du message engagé.
Paul Bocuse a mis 50 ans, pas à pas, à faire devenir des chefs leaders d’opinion voir personnage publique, par notre facilité à avoir accès au média comme facebook ou instagram ou la diffusion d’un communiqué de presse, nous dérivons vers un excès de réputation sans penser à la notoriété de la gastronomie. Dans quelques années, si cet univers n’est pas préservé, il sera banalisé.
Définitivement, je recommande de ne pas plus, mais de mieux communiquer.