Prendre de la distance avec les événements d’un jour donné n’est pas chose simple. D’autant plus, quand le métier de restaurateur et d’hôtelier est en permanence dicté par des desiderata multiples de clients qui vous accompagnent que quelques heures lors d’un repas ou quelques jours lors d’un séjour.
En conséquence, les circonstances aujourd’hui, ne seront pas les mêmes demain, et vos clients plus exigeants, attendent de vos équipes d’avoir des comportements de plus en plus réactifs grâce à leurs disponibilités : alors que nous sommes au cœur d’une crise des ressources humaines.
En parallèle des marques leader de référence se lancent dans des programmes d’anticipation de demandes clients, combinant le service au tout début du parcours client : c’est-à-dire quand le client n’est pas encore dans votre établissement. En parallèle, d’autres s’offrent des solutions de laboratoire de cuisine en dehors de leur cuisine de production pour tester de nouvelles recettes au calme, penser la prochaine carte qui arrivera car tout le monde à compris que l’une des attentes fortes des clients est la traçabilité et l’origine des produits et que les guides sanctionnent maintenant, et définitivement, la saisonnalité. (Le locavore n’étant pas un critère d’un guide, à ne pas confondre avec la saisonnalité).
En synthèse, le marché peut devenir brutal avec une entreprise qui ne réfléchit pas les séquences avant leur réalisation.
Penser son œuvre, son service client, sa création de plat, l’explication de son menu, son accueil à l’hôtel, en un mot, « l’expérience client », seulement au dernier moment, provoque une perte de sens de la part des équipes et les quiproquos successifs du quotidien ne se règlent pas avec des réunions de coin de fourneaux ou de buanderie. Car ici la communication interne de l’entreprise se fabrique avec des « on m’a dit que » des imprécisions, des incertitudes.
L’entreprise qui pense que le leader est celui qui hurle au quotidien pour régler une séquence, est celle qui n’aura plus d’avenir dans les 2 à 3 ans. Au final, il hurle car il n’a pas su se faire entendre et comprendre pendant les phases de préparation.
Le sens de mon billet n’est pas de dire qu’il faut absolument « intellectualiser » chaque acte , mais de comprendre que dans 80 % des entreprises que j’accompagne, je détecte que notre seul ennemi est le temps et que peu l’intègrent dès le départ. Les leaders et les responsables s’occupent avec les séquences du quotidien et ce temps qui n’est pas mis au service de questions telles que « que seront nous demain », et autres sujets essentiels pour cette nouvelle génération qui a besoin de beaucoup plus de sens et d’apprentissage des méthodes pour se révéler.
Alors comment faire lorsque l’on est décideur d’une entreprise, responsable d’un service pour s’assurer que sa prestation offre toujours le meilleur rapport qualité-prix et s’intègre dans un retour client convaincu allant même jusqu’à une émotion ?
Certes, vous pouvez vous fixer des objectifs, définir vos priorités, vous fixer une limite de temps pour une mission, planifier, réaliser une mission à la fois, afin de ne plus vous disperser et formaliser les procédures que vous attendez, c’est déjà une première solution.
Je crois surtout qu’il faut faire la différence entre l’essentiel et l’important, l’essentiel par exemple c’est que l’entreprise soit rentable pour être pérenne et que vos équipes s’intègrent dans un processus de plan de carrière et au service du client, l’important, c’est peut-être de progresser dans les guides.
Ensuite, pour faciliter la communication interne et l’échange avec vos équipes, le classement des sujets entre le stratégique, tactique et opérationnel permet de donner une dimension plus affirmée du temps qu’il faut consacrer.
- Le « stratégique » est une séquence où les hypothèses doivent être fortes et la créativité la plus grande pour rêver demain. Il définit une ligne directrice, une ambition et elle ne doit jamais trahir les valeurs de la marque sauf à vouloir faire pivoter son entreprise (exemple Pivoter = mon restaurant gastronomique devient un bistrot du jour au lendemain).
- Le « tactique », c’est la zone qui doit être la plus combative car elle demande de structurer, de créer la documentation qui permet l’enseignement, elle est souvent la plus négligée dans les entreprises, on la colmate même avec des normes iso dans d’autres secteurs pour la rendre obligatoire. Le tactique est pourtant le pivot de l’entreprise car la structure apporte la conviction et la conviction la quête d’excellence.
- L’« opérationnel », c’est la zone où la seule occupation doit être le service et le plaisir dédié au client et naturellement quand la tactique est mal fichue, les équipes se posent des questions au cœur d’une prestation qui fait que les enchaînements ne sont plus fluides et le client le ressent. L’opérationnel, c’est lorsque je suis sur le terrain pour marquer des buts ou pour remonter les ballons, à ce stade je ne entrainement plus ou je ne teste plus, car l’entrainement c’est du tactique pas de l’opérationnel.
En conclusion, il est certain que les jours se suivent et ne se ressemblent pas, c’est une des beautés de la vie, cependant pour s’apporter et apporter le maximum de plaisir chaque jour, il est utile de comprendre que votre seul ennemi : c’est le temps, soyons plus forts que lui, dictons-lui le rythme.