« Le but de l’étoile verte à la fin des fins : c’est qu’elle disparaisse – L’étoile verte est née pour mourir le plus rapidement possible. Cela ne doit pas être comme l’étoile rouge, cela (l’obtention de l’étoile verte) doit devenir une évidence pour chacun »
C’est ce qu’a expliqué Madame Elisabeth Boucher-Anselin directrice de la communication du Guide Michelin lors de la dernière édition 2023 du « Chef à Table » organisé par Anne Luzin du Magazine Le Chef à une trentaine de chefs distingués à Tours invités chez Christophe Hay.
Il existe 468 étoiles vertes dans le monde, dont 88 en France (sur 3500 adresses), il reste donc encore du temps à ce que ce symbole disparaisse !
Cela démontre que sur le terrain, le Guide Michelin agit pour guider les consommateurs vers les tables qui s’empoignent des enjeux de la durabilité et à travers cette démarche, encouragent les restaurateurs à mieux protéger la planète et ses habitants.
« Le second pays le plus distingué est l’Allemagne, puis l’Italie. Pour le Japon souvent avant-gardiste en gastronomie, cette distinction a été très compliquée (poids des traditions, pêcheurs illégaux, poissons protégés voire en voie de disparition …), les grandes tables ne sont pas encore au rendez-vous. Les premières étoiles vertes au Japon se comptaient sur les doigts d’une main. » Précise Madame Boucher-Anselin.
Alors si cette étoile a été conçue pour les consommateurs qui « votent de moins en moins mais votent tous les jours dans ce qu’ils consomment », comment l’obtenir ?
Pour la porte-parole ambassadrice de cette question au Guide Michelin la réponse est claire :
« Nous avons 2 piliers :
- La nature, la sincérité et l’effort de la démarche de l’établissement
- La capacité d’en parler aux clients : faire bien, c’est bien cependant en parler c’est essentiel, et c’est le rôle des métiers de la salle
Madame Elisabeth Boucher-Anselin rappelle que cela honore « Une responsabilité environnementale mais pas sociétale. » En message clair : « nous ne sommes pas l’inspection du travail. ».
Elle explique « qu’il n’est pas nécessaire d’être dans le locavore, si l’engagement du producteur est bon et qu’il est de l’autre côté de la France ou du monde, ce n’est pas un élément pénalisant. »
Pour le Michelin, « Les critères figés engendrent d’autres problèmes, il faut donc être très vigilant par exemple à ne pas interdire, car une filière peut être impactée immédiatement (filière bovine). Nous ne sommes donc pas dans une démarche qui impose des critères ou des restrictions. L’étoile verte n’est pas un label (comme Ecotable), on ne peut pas acheter un audit au Guide Michelin. La question du Bio sur le plan planétaire n’est pas identique ».
Comment communiquer sur ses engagements ?
« Nos inspecteurs ont vécu d’immenses leçons de pédagogie… en aucun cas cela nuit à l’expérience de table à partir du moment où cette démarche est pédagogique. Le mot déchet n’est pas joli par exemple mais il y a une approche sur le gaspillage alimentaire plus facilement explicable. » Enfin, « Ce n’est pas votre capacité à communiquer sur Instagram qui sera jugée par les inspecteurs. »
Est-ce que les vins natures ou bio rentrent dans les critères ?
« Non, mais c’est un plus si cela s’inscrit avec cohérence. »
Comment faire savoir au guide que la démarche durable est au cœur de l’entreprise ?
« C’est très bien de communiquer avec le guide cependant le critère sera lors de l’inspection. »
Lors de cette prise de parole, Madame Boucher-Anselin conclut par « Lorsque nous avons lancé cette démarche il y a 4 ans nous nous sommes fait peur car nous avions des interrogations sur les années suivantes… Et finalement, c’est un véritable succès par le chemin pris par les restaurateurs. A l’étranger, la question qui revient le plus fréquemment est comment les chefs français font pour avoir autant d’étoile verte ? La France a un temps d’avance par rapport à l’étranger. Extrêmement prometteur pour l’avenir. »
Mon sentiment :
La démarche du Guide Michelin est sincère, ils ont lancé un « truc » il y a 4 ans sans bien savoir où cela allait atterrir et aujourd’hui les consommateurs peuvent identifier des tables « à l’étoile verte » sans pour autant que celle-ci passe par la case bib gourmand ou étoile rouge.
L’atterrissage est donc juste car il concerne tout le monde : comment construire une économie vertueuse ?
L’irritant pour les chefs reste le fait de toujours devoir se justifier envers d’autres pour se faire remarquer alors que dans cette démarche, nous touchons à l’engagement personnel et s’engager ce n’est pas toujours fait pour se faire remarquer.
Simplement en France sans chercher très loin, 80 et 100 autres tables supplémentaires ont déjà le niveau des engagements requis pour cette étoile, même certaines tables vont plus loin que les 88 déjà dans le palmarès.
Si d’aventure, vous souhaitez sensibiliser le guide et rendre vos démarches visibles.
1 ) Informez par courrier le Guide Michelin en amont de votre démarche, lorsque qu’ils organisent la tournée des inspecteurs, ils seront au courant de votre volonté pour rappel cette distinction est décernée après une visite.
2 ) Repensez le cérémonial de service autour de ce thème, finalement de nouvelles prises de parole pour votre équipage de salle, un moyen de rendre plus attractif l’expérience et la conscience.
3 ) Envisagez un programme d’évolutions successives sur les sujets de la durabilité pour votre établissement, le but n’est pas de faire pivoter votre modèle mais de le faire progresser. La mise en place de statut d’entreprise comme « entreprise à mission » permet de s’empoigner en profondeur de ces sujets et de couvrir aussi le sociétal en plus de l’environnemental.
Finalement communiquez mieux, pas plus.