Dans le panorama de réseaux d’hôtels, vous avez les chaînes intégrées et les chaînes volontaires. Dans le premier cas, la chaîne organise et structure la totalité de l’expérience et du parcours client, et peut même être investisseur ou propriétaire. Dans le second cas, les propriétaires sont des exploitants ou investisseurs privés, qui adhèrent à une enseigne pour permettre à leur établissement de trouver un écho auprès du plus grand nombre.
Les chaînes préparent toutes leur plan d’action 2018. Certaines achètent des concurrents pour compléter leur gamme, d’autres souhaitent changer de nom, certaines se concentrent également sur le regroupement de tables de restaurants… et pour la plus importante, elle transforme sa marque ombrelle en portail de distribution pour tenter d’affronter booking.com sur le newbiz, et rachète une collection de sociétés dans les technologies pour les faire tenter de travailler ensemble, et vendre au final des services d’achat de mots clés dans Google.
En un mot : cela bouillonne dans les bureaux à Paris ! On a la niaque ! Disruptif, je ne sais pas, mais éruptif c’est sûr !
Je suis toujours parti du principe qu’un hôtelier non affilié était un hôtelier isolé.
Pas tant dans sa représentation commerciale, mais plutôt dans ses relations avec les autres membres qui apportent un réseau de réflexion, de connaissance des maisons, car souvent les clients finaux sont les mêmes de l’un à l’autre et dans notre monde absolu de transparence forcé par le digital, les relations directes sont une chaleur nécessaire à la progression de l’intelligence collective humaine.
Cependant, je n’ai jamais eu autant de questions de la part de nos clients hôteliers pour savoir s’il fallait quitter leur chaîne hôtelière, et quelle que soit celle-ci. En réalité, un fossé se creuse entre les attentes des membres et la vision des dirigeants ou fondateurs des chaînes hôtelières.
L’un des arguments principaux des chaînes hôtelières, est d’offrir un réseau qui va permettre de combattre le géant booking pour trouver des nouveaux clients en les rejoignant, tout en les positionnant sur un segment de marché grâce à la notoriété de l’enseigne.
Les plus habiles obligent leurs membres à prendre un logiciel de réservation unique de la chaîne, connecté aux portails de distribution, pour apporter des rapports de performances siglés par leur chaîne. Cependant, un junior en yield management sera facilement détecter que 97 % du business provient des portails de distribution et pas du portail de la chaîne. Il existe cependant un intérêt dans cette technique, c’est que la chaîne va négocier les contrats de distribution avec les véritables géants du web et l’indépendant peut donc en bénéficier.
En même temps, c’est un risque important sur le long terme, car comment changer de chaîne hôtelière pour l’indépendant si par exemple son positionnement évolue alors qu’une seule et unique personne gère la totalité de ses revendeurs ! Un marketing de perversion parfaitement au point !
De mon point de vue, il existe de nombreux autres services que pourraient mettre plus en avant les chaînes hôtelières : les centrales d’achats, la formation, les contrôles qualité qui déboucheraient vers des solutions de progression métier, des services d’identification de filières des petits producteurs si restaurant il y a, des services presse de proximité pour offrir de meilleures solutions auprès de la presse régionale..etc..
Mais non, le projet général reste combattre Booking qui pique les marges et Airbinb, les parts de marché. D’un autre côté, il ne faut pas être Madame Irma pour observer où se rend en premier le consommateur pour se renseigner..
Et puis, lorsque vous êtes proche d’un marché et à l’écoute des établissements qui le composent, vous avez une perception qui est tout autre : la synthèse des témoignages que je recueille sont les suivants :
• Pourquoi vouloir nous chercher des nouveaux clients, alors que nous n’avons pas d’équipes pour s’en occuper ?
• Et puis au final, tous ces nouveaux espaces d’opportunités comme les réseaux sociaux, le socialselling, ne sont-ils pas des espaces à plutôt investir, versus un abonnement à une chaîne hôtelière ? Ce serait quoi le ROI ? Et au final c’est quoi le ROI de ma chaîne hôtelière ?
Sur le premier point, je rejoins le sentiment des professionnels. Pourquoi promettre l’impossible face à Booking, alors que le besoin, c’est de trouver des solutions pour revaloriser la filière de l’emploi, se mobiliser pour les métiers de salle et de service, et de comprendre que la formation métier, ce n’est pas à l’école qu’elle s’apprend, mais en entreprise. Car la mission de l’école, c’est l’enseignement (et puis tant que j’y suis : l’école son rôle, ce n’est pas l’éducation, çà, c’est le rôle de nous, les parents !).
Alors ainsi, je me pose plusieurs questions suite à l’écoute des professionnels :
• Pourquoi les chaînes hôtelières ne mettent pas en place des parcours d’excellence au sein de leurs enseignes, pour accompagner la progression métier à travers celles-ci?
• Pourquoi les solutions offertes aux membres,se résument à un encart regroupé d’annonces où les membres se ruinent en publicité RH pour au final recevoir les mêmes CV ?
• Pourquoi les chaînes hôtelières ne mettent pas en place, et ne généralisent-t-elles pas des forums de l’emploi dans les écoles hôtelières ?
• Pourquoi les chaînes hôtelières ne travaillent-elles pas sur des programmes de retour à l’emploi, ou de réorientation de carrière pour des personnes néophytes au secteur ?
Si j’avais une image à donner, lorsque je regarde les bénéfices offerts aux membres d’une chaîne hôtelière, j’ai la sensation d’écouter un dirigeant de chez Kodak à l’époque de la naissance des appareils photos numériques.
Le newbiz est important pour un membre d’hôtel, cependant l’essentiel pour une enseigne, c’est de devenir un territoire d’expression avec une signature de marque. Ne faut-il pas plutôt investir sur la communauté identifiée ?
La communauté, c’est l’intelligence à regrouper des clients acquis par différents canaux de distribution en des valeurs partagées.
Cela peut se traduire à travers un programme de fidélité, des solutions par application, des groupes dans les réseaux sociaux… Une communauté, c’est aussi des collaborateurs qui travaillent dans les enseignes, et qui eux même pourraient bénéficier d’avantages dans les autres établissements : vous avez déjà vu des programmes performants en ce sens dans les chaînes volontaires ?
Demain, les communautés se transformeront en tribu, et lorsque le consommateur se sent adhérent d’une tribu, il devient le meilleur des ambassadeurs. Ainsi, la performance commerciale de demain, viendra de la parole de l’individu, qui centralisée les unes aux autres, permettent à l’inconnu de se laisser séduire pour vivre à son tour l’expérience (certains appellent déjà cela tripadvisor…)
Pourquoi, par exemple, la chaîne hôtelière ne travaille-t-elle pas sur des idées novatrices de livre d’or partagé et ouvert ?
Exister dans un monde qui se globalise, ce n’est pas penser global, c’est comprendre le local. C’est avoir une vision qui combinerait les deux et agirait ainsi sur deux leviers en une seule impulsion : Le GLOCAL.
Animer un réseau n’est pas une chose évidente, cela demande de l’énergie, de l’écoute, de la persuasion, de la compassion et de l’enthousiasme à chaque instant. Les femmes et les hommes qui animent les enseignes ont ces talents. Il faut juste que les membres précisent mieux leurs besoins de l’instant, et partagent dans un collectif leur vision, car comme je l’indiquais en introduction : un hôtelier non affilié est un hôtelier isolé.