En France nous avons l’art et la manière de contester le bonheur des autres, et quand cela touche la gastronomie, notre Président a raison : nous sommes bien 66 millions de procureurs.
La difficulté de certains à comprendre pourquoi un jeune chef parisien a eu sa première étoile en quelques mois d’activité, les foudres de certains journalistes « j’y ai mangé un des pires plats de la rentrée », ou un autre qualifiant le guide de trahison car il met en lumière une jeune femme offrant une expérience de cuisine végétarienne alors que la cuisine en France serait selon lui « Une gastronomie française – catholique, aristocratique et centralisée – bâtie depuis toujours sur l’élevage et la consommation de produits carnés », enfin toute cette petite musique conditionnée par des mouvements de lignes éditoriales et polémiques à la « Cnews » envahit aussi le monde la gastronomie.
Alors permettez-moi de vous donner une autre lecture de l’édition 2021 de ce guide : Gilles Goujon a attendu 5 ans sa première étoile, Olivier Nasti 10 ans sa deuxième et Guy Savoy 17 ans sa troisième. Par le passé la mise en lumière était tellement longue auprès du grand public que la haute gastronomie française s’était figée comme s’il fallait attendre que les anciens fassent de la place aux autres. Certains laissaient même leur propre répertoire dans le formol car soi-disant pour garder le niveau, il ne fallait rien changer, conclusion : on ne s’est jamais autant emmerdé dans les années 90 que dans un restaurant.
Il y avait même l’idée que le Gault & Millau devait dénicher pour que le Guide Michelin confirme afin que le fooding dénonce. Les marques gagnantes de demain ne bâtiront pas leur succès sur les réactions des autres, mais bien sur leur audace, leur agilité et le sens qu’ils donneront à leur action.
Alors oui, bravo à Claire Vallée du restaurant Ona, Bravo à Mory Sacko, Bravo à Yannick Alléno d’avoir aussi conservé à Pavie 2 étoiles, et bravo à Alexandre Mazzia d’avoir eu aussi rapidement 3 étoiles car en réalité ce qui gêne les frustrés, c’est que ces personnes sont des contemporains qui regardent l’avenir avec comme thème central : l’innovation.
Et quelle lueur d’espoir de la part de la direction France du Guide Michelin d’indiquer à un bon nombre de jeunes chef.fes qu’il est possible de continuer à s’investir dans la haute gastronomie et d’avoir des résultats plus rapides que par le passé. Car les longueurs d’avant commençaient à désintéresser de grands talents de ce secteur, alors que c’est lui, entre autres, qui crée l’avenir de la gastronomie pour tous.
En dénonçant le succès, les observateurs se trompent d’analyse car sur ce thème, le guide Michelin progresse, il lui reste cependant à créer de meilleures pratiques sur l’annonce auprès des tables rétrogradées.
En aucun cas je ne mettrais en cause le choix des inspecteurs, tous les chefs connaissent la règle du jeu et c’est même devenu un mode de communication pour eux où chaque année dans les réseaux sociaux toutes les tables, y compris celles en meilleure position, remercient le guide de sa confiance à coup de communication dans Instagram. La boucle est bouclée, chaque année les tables peuvent reprendre la parole auprès de leurs clients et la marque Michelin est citée par l’ensemble de la sélection et pas seulement par les nouveaux nominés.
Cependant sur le thème de la rétrogradation, les équipes du guide devraient trouver une meilleur façon d’annoncer la perte que celle pratiquée actuellement, où en ouvrant un site internet, les tables rétrogradées découvrent seules ce fait ; car pour ces personnes, chaque année, l’incompréhension s’installe par la surprise, et parfois cela se transforme en traumatisme qui peut laisser apparaitre des séquelles et croyez-moi mes mots ne sont pas disproportionnés. Le chef n’est pas la seule personne touchée, les épouses ou les maris sont parfois plus marqués et l’ensemble des équipes par manque d’explication de la part du guide perd ses repères.
A tous ces talents concernés et bien entendu si c’est votre choix de chef d’entreprise, il est possible de retrouver cette distinction, dans des délais records et sans perdre de rentabilité, par exemple Jacques Lameloise en 2007 à récupéré sa troisième étoile en deux ans, Mickael Feval à Aix-en-Provence dans ce même délai en 2021.
A notre époque, je ne serais pas choqué si une table récupérait en une seule année sa distinction car une étoile filante se signale toujours par un trait de lumière.