La remise est-elle devenue la seule solution pour le restaurateur ?

Il n’y a plus un jour où, sur mon fil Facebook, je ne croise pas une offre de restaurant à -50 %, et de plus en plus, cela concerne ceux dont le positionnement est gastronomique.

Pourquoi la remise est-elle devenue un basique commercial ? A force d’habituer le consommateur à devenir « chasseur d’offre », n’allons-nous pas casser toute une chaîne de valeur à l’intérieur de laquelle, même le producteur devra faire des remises sur un marché déjà extrêmement tendu, pour garder un équilibre financier en fin d’année ?

A l’origine du phénomène, les sites de distribution de tables de restaurant en France, qui n’ont pas apporté d’innovation. Ils ont tous, simplement copié le modèle économique et technologique d’Opentable. Cependant, de l’autre côté de l’Atlantique, les restaurateurs se sont équipés de la solution, non pas pour la distribution, mais pour le cahier électronique de réservation… car pour gérer les disponibilités de tables sur plusieurs créneaux horaires, cela a été un outil d’organisation confortable tant pour le client que pour le restaurateur.

En France, la mayonnaise n’ayant pas pris autour des bénéfices du cahier électronique pour le restaurateur, ce sont les sites de réservation qui se sont imposés comme nouveau vivier de consommateurs potentiels. Mais, pour attirer ces consommateurs vers un unique site, il a fallu proposer à ces derniers des avantages : c’est ainsi que sont nées les tables à – 30 %, – 40 % – 50 %… car en faisant des « prix », la promesse du distributeur a été de mettre le restaurateur en première page du site, et a ainsi habitué le consommateur à ne plus payer le véritable prix…
C’est bien simple, partis comme nous sommes, je pense qu’à ma prochaine réservation, on me proposera de l’argent pour que je vienne manger.

Généralement, le rôle du distributeur consiste à flinguer un marché, à coup de remises et de commissions. Il suffit de voir la détresse de nos agriculteurs… Le restaurateur est-il condamné à cet avenir morose ? Au cœur de cette économie, le restaurateur est un transformateur par l’apport de son service, c’est ici que se construit sa plus-value. Pour qu’elle soit préservée, il est nécessaire de réfléchir à son circuit de distribution.

Envisager de faire des remises, c’est d’abord se demander si celles-ci doivent être disponibles depuis ses propres outils de commercialisation, (site officiel, réseaux sociaux…), ou si elles doivent être disponibles sur des marques tierces, comme les portails de vente privée ou de distribution.

Si votre stratégie est de passer par des intermédiaires, l’idée de la conversion ne doit pas se restreindre à la seule réservation, il faut aussi envisager des solutions pour attirer ce consommateur de marque générique vers votre propre marque pour un prochain acte d’achat.

Enfin, privilégier les meilleures offres, c’est savoir les adresser en confidentiel à ses clients déjà acquis car c’est eux qu’il faut récompenser, (campagne e-mailing ou campagne sms, groupe privée sur facebook..) et pour en gagner des nouveaux, il ne faut pas donner la sensation de casser un marché. En étant trop agressif en termes de remise, le nouveau consommateur peut perdre confiance en la marque qui fracasse ses prix, et le restaurateur réduit inévitablement sa marge, son résultat d’exploitation et ainsi sa capacité à subvenir à ses prochains investissements.

Alors que faire pour ne pas basculer dans la technique facile de la remise, qu’est-ce qu’un restaurateur peut faire ?

Ma première recommandation consiste déjà à savoir si sa propre offre tarifaire est bien dans le marché, à combien est le menu dégustation chez mon confrère, est-ce que ma carte a une ouverture de gamme assez large ? Peut-être tirerons-nous comme enseignement, que les prix sont tout simplement trop élevés, ce qui conduit inexorablement à faire des remises en permanence.

La seconde serait d’envisager une façon de récompenser ses propres clients fidèles, par exemple en montant un club, ou en mettant en place une carte de fidélité pour encourager le client à venir plus souvent par le biais d’avantages ou de privilèges… la dixième réservation offre une gratuité, (mais les dix premières étaient consommées au prix réel)… la reconnaissance et la considération sont depuis toujours des leviers incontournables pour développer un business.

Ensuite, il faut différencier ses messages en fonction de ses cibles, le consommateur individuel n’est pas celui de l’entreprise, sur ce dernier segment, il faut créer de l’innovation de services. Par exemple, comment réaliser une facture mensuelle pour une entreprise qui invite ses clients et ainsi simplifier son traitement pour la comptabilité interne, ou encore comment élaborer un menu à choix, mais accessible en 45 minutes maximum. Toute forme de différenciation par l’offre doit faire l’objet d’une réflexion.

Enfin, faire une remise est toujours possible, mais il est préférable de l’envisager sur quelques tables uniquement, comme une sorte de vente privée pour créer l’évènement et ne pas se retrouver complet, mais qu’avec des tables à – 30 % !

Dans un marché de plus en plus concurrentiel, il n’est plus possible d’attendre passivement le client envoyé par les guides ou le bouche à oreille.

Au-delà de la notoriété de la marque, c’est-à-dire le plan de communication, il faut envisager de bâtir un plan marketing et commercial sous le signe de l’audace et de la différenciation concurrentielle, pour privilégier la relation directe avec son client. C’est une des pistes pour renouer avec une rentabilité solide et assurer la pérennité des restaurateurs et limiter ainsi, la remise…

Et c’est par l’innovation et la différenciation concurrentielle que vous deviendrez incomparable. Lorsque vous offrez une prestation d’expérience unique sur un marché : cela n’a pas de prix !

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