Les restaurateurs sont touchés à la fois par la flambée des prix de l’énergie, la hausse des matières premières, et la réévaluation des salaires. Demain des restaurateurs peuvent frôler la vente à perte, quel est l’évolution du marché ? que se passe-t-il en fonction du segment ?
La restauration haut de gamme sera celle qui saura le mieux et le plus faire accepter des augmentations de prix des menus, car la clientèle souhaitant s’offrir un moment d’exception sera prête à consacrer un budget plus important.
Je constate que le ticket moyen est plus élevé le soir, ce qui fait beaucoup réfléchir un grand nombre d’établissements dans les grandes villes à n’ouvrir que le soir et en conséquence augmenter le nombre de couverts, c’est par exemple la décision du 3 étoiles de Christian Lesquer ou du restaurant de la Réserve à Paris – Jérôme Banctel.
Côté province, j’observe aussi que le prix moyen du samedi est particulièrement élevé dans de nombreuses maisons, le dimanche reste ce fameux service interminable et en plus à un prix moyen dans la fourchette d’une fin de semaine.
Autres évolutions de constatées, de nombreuses maisons rendent la consommation de coffrets cadeaux disponible uniquement sur les jours de la semaine, et de plus en plus retirent leur offre avec vin compris, l’idée étant que si l’acheteur du coffret cadeau n’est pas le bénéficiaire, le bénéficiaire une fois sur place consommera plus sur les vins car le repas est déjà offert. Nous remarquons aussi une augmentation forte des prix des coffrets cadeaux à partir de septembre, en moyenne de + 15 % chaque année.
Aussi, la restauration haut de gamme a des à-côtés à forte marge comme les apéritifs, l’eau et les cafés vendus et le coefficient sur le prix des vins est au minimum à X 2.5 et va jusqu’à X 7 X 8 sur certaines bouteilles !
Enfin, les No-show (pertes qui étaient encore importantes, il y a 4, 5 ans) se résorbent de mieux en mieux car la clientèle commence à comprendre le sens de la réservation avec empreinte bancaire et sur les 627 étoilés au guide Michelin 425 ont déjà un logiciel de réservation en ligne de table offrant ce type de service. Si l’on regarde de plus près : 161 ont TheFork, 132 Zenchef, 128 Guestonline, 3 Réservit, 1 Seven rooms, 194 ont encore des formulaires ou de l’auto-gestion et 8 n’ont aucune solution. (étude mai 2022)
Sur ce sujet des no-show, je n’ai jamais compris pourquoi l’ensemble des chefs qui se connaissent tous pratiquement entre eux, n’ont jamais réussi à mettre en place une coutume commune pour plus facilement habituer les clients à ce rituel de la carte bancaire.
Concrètement, il va être plus facile pour un restaurant haut de gamme de pratiquer une augmentation de prix, alors que la décision sur la restauration traditionnelle, la bistronomie et la restauration rapide reste difficile car la clientèle est sensible au juste prix d’autant plus dans le contexte inflationniste de l’ensemble de la consommation. Une question se pose même pour les établissements ayant des Bib Gourmands, même si la qualité reste, de nombreuses tables sortent du prix conseillé pour couronner cette distinction et répercutent ces hausses communes quelques soient les décisions du guide l’année suivante. Dans les faits, tout le monde sait quand une table prend un bib en local mais personne ne le remarque quand il est perdu au contraire de l’étoile.
En grande ville, le phénomène de l’Afterwork est le point de bascule qui permettra de faire évoluer l’offre de certains restaurants, où à partir de 18 heures, une nouvelle clientèle plus jeune se saisit des restaurants pour se retrouver autour d’une cuisine de partage, de Bière, de Gin et Vodka. C’est un avant-service qui fait évoluer l’offre et prolonge sur des plats en direct pour certains. L’une des solutions est peut-être donc la structuration d’un 3ème service celui de 18 heures et qui permettrait de faire des journées continues pour l’équipage.
Sur les autres territoires, l’équilibre est plus compliqué, il restera un prix d’appel, mais par exemple le menu 3 plats va maintenant migrer en 2 plats : entrée + plats ou Plats + dessert pour le même prix, et les autres menus à plus de séquences peuvent quant à eux plus facilement être augmentés, pour résister : une augmentation à plus de 10 % est conseillée.
Enfin, c’est aussi le moment de revoir les coefficients sur les vins et autres boissons, il reste de la vente additionnelle moins mémorable pour le consommateur qu’il achète en fonction de ses envies.
Simplifier la carte est aussi une des garanties d’une meilleure rentabilité, pour avoir moins de préparation préliminaire, le menu carte s’impose même dans de nombreuses maisons, c’est-à-dire que toute la carte se consomme en formule menu et vice-versa.
Augmenter les repas, ce n’est pas une décision pour gagner plus, mais pour ne rien perdre et comme à chaque mouvement d’un marché, les établissements qui seront pionniers dans la réflexion de leur offre seront les leaders de demain.