Un guide gastronomique doit-il dans sa notation sanctionner des tables où la violence en cuisine ferait rage ?

Au Royaume-Uni des chefs militent pour le retrait de l’étoile Michelin en cas d’abus en cuisine, une pétition signée par 522 personnes a même vu le jour et Brian McElderry, directeur exécutif du syndicat, a appelé tous les membres de l’industrie à la signer pour créer un environnement de travail plus sûr.

Pour bien comprendre cette initiative, tout est parti d’allégations dénonçant le restaurant de William Kitchin comme « un lieu de travail toxique ». Cela provient d’un compte anonyme sur les réseaux sociaux qui expliquait qu’il y aurait des brimades et agressions physiques dans ses restaurants. Treize anciens salariés se seraient manifestés et auraient accusé le chef étoilé de les avoir maltraités ou humiliés au travail. Le chef de 44 ans qui dirige le restaurant étoilé Michelin d’Édimbourg, The Kitchin, a rompu son silence sur les réseaux sociaux avec une déclaration de 300 mots pour confirmer que le groupe Kitchin avait nommé une société de ressources humaines indépendante pour enquêter sur les allégations.

Mais le sujet de mon billet n’est pas cette affaire qui évidemment si elle s’avère vérifiée doit être sanctionnée par les autorités compétentes, mais l’idée que certains chefs de l’autre côté de la Manche pensent que les guides gastronomiques auraient un autre rôle à jouer en intégrant des critères de bienveillance, considération de management dans leur distinction, ou sinon qu’ils restent sur leurs critères gustatifs mais si des faits seraient prouvés ou jugés de cette sorte dans une maison : une distinction gustative soit supprimée.

Le sujet arrivant doucement en France sur la table, je me suis donc posé la question cette semaine avec un avis clair : ce n’est pas du tout le rôle d’un guide gastronomique mais surtout je pense que cela cachera encore plus les vraies solutions déjà en place pour régler le problème du mal-être au travail.

Le rôle d’un guide gastronomique est d’éclairer un consommateur, de lui indiquer ses recommandations en fonction d’une grille de notation et en fonction de la réalité temporelle d’excellence de la maison : ainsi c’est conserver une mission que j’appelle le pouvoir de la joie.

En imaginant donner des gallons supplémentaires à un guide gastronomique sur le thème du social, c’est rendre inaudible son positionnement, et supposer qu’il aurait un statut de juge moral. Certes nous pouvons nous poser la question si un consommateur serait séduit par un guide qui combinerait : une origine des produits, une saison, une traçabilité et un engagement social, mais quelle confusion pour un consommateur et quel message serait donné à nos institutions garantes de sanctionner ces déviances.

Mais oublions ces arguments sur la fonction d’un Guide Gastronomique, je voudrais revenir sur l’essentiel : comment aider des personnes en souffrances ?

En France des solutions existent et elles sont mal connues : Si vous êtes victime de harcèlement au travail, France Victimes est là pour vous venir en aide. C’est ouvert 7j/7 de 9h à 19h par le biais du numéro gratuit d’aide aux victimes, le 116 006 (hors métropole +33 1 80 52 33 76).

Il faut rappeler que le harcèlement au travail, qu’il soit moral ou sexuel, est puni par le Code pénal.

  • Le harcèlement moral est un délit puni jusqu’à 2 ans d’emprisonnement et 30 000 euros d’amende. L’auteur peut également être condamné à verser des dommages-intérêts à la victime (préjudice moral, frais médicaux…).
  • Le harcèlement sexuel est un délit punissable d’une peine de 2 ans d’emprisonnement et 30 000 euros d’amende. La sanction est portée à 3 ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende en cas de circonstances aggravantes. L’auteur peut également être condamné à verser des dommages-intérêts à la victime.

Enfin, les mentalités changent, je vois l’attention qui est maintenant menée par de nombreuses maisons pour inclure des formations sur les meilleures pratiques de management souvent méconnues car la progression des hommes dans les entreprises vient de la connaissance de leur art mais pas de l’apprentissage du management.

Depuis quelques années, j’ai personnellement plaisir à intervenir au moins une fois par semaine dans différentes maisons en France de toute catégorie pour apporter une prise de recul sur les meilleurs comportements à adopter pour gérer les équipes et révéler les managers qui entourent les dirigeants : c’est l’une des clefs.

Des bonnes pratiques existent mais elles sont mal ou peu connues ; comme une recette cela s’apprend et ensuite cela se transmet mais un pan entier d’enseignement manque sur ces questions, ce qui a conduit des entreprises à des managements autocrates dans certaines situations ou d’autres maternants dans d’autres.

Une entreprise qui réussit sa mission doit mettre au cœur de son processus la coopération : un équilibre entre exigence et assistance.

Enfin demain, l’ensemble des entreprises doivent entrer en plus de leur critère de rentabilité des indicateurs clefs sur le bien-être au travail et leur engagement sociétal, ce n’est pas une affaire de guide mais un enjeu de responsabilité solidaire.

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